Comme ils arrivaient à la porte du petit vestibule, donnant accès dans
le billard, le maître de cérémonies s’effaça pour les laisser passer. Ils entrèrent, mais ce fut sans prendre garde à la bizarre faveur dont ils étaient
l’objet. Ni l’un ni l’autre n’avaient remarqué le manège de la sentinelle,
mettant son profond salut et le nom de Mᵐᵉ la comtesse entre la porte et
ceux qui voulaient franchir le seuil.
Parmi les radieux salons et les réduits exquis que la maîtresse de céans avait prodigués au plaisir de ses hôtes, le billard méritait une mention
spéciale. Il semblait qu’une main caressante eût multiplié dans cet espace
étroit tous les jolis prestiges du luxe parisien et toutes les mignonnes féeries.
Rien ne rappelait l’usage habituel auquel le lieu était consacré. Une
tenture de lampas fleuri habillait les lambris sévères et dissimulait les attributs du noble jeu qui fit de Chamillard un ministre de Louis XIV.
La place même de cette table oblongue, recouverte d’un doux tapis, où les
virtuoses de l’effetfont décrire aux billes de si miraculeuses courbes, était
occupée par un jardin en miniature, au milieu duquel un jet d’eau lançait
ses gerbes perlées
Florian D’ABLON –
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